1,5 % : c’est la proportion d’enfants chez qui un trouble du spectre autistique (TSA) est détecté aujourd’hui, un chiffre qui, loin de n’être qu’une statistique, interroge la transmission de l’autisme au sein des familles. Les dernières recherches percent un tabou bien ancré : la probabilité que l’un ou l’autre parent en soit le vecteur n’est pas la même. Des mutations génétiques rares, lorsqu’elles proviennent de la mère, augmentent nettement la probabilité qu’un enfant développe un TSA. À l’inverse, les variants transmis par le père semblent peser moins lourd dans la balance du risque.
Dans certains cas, des mutations apparaissent spontanément, sans que la famille n’ait d’antécédents. Ce phénomène brouille les pistes pour ceux qui cherchent à comprendre l’héritage génétique de l’autisme. Les chercheurs poursuivent leur décryptage de cette interaction trouble entre bagage génétique et environnement, un chantier scientifique où rien n’est jamais tranché.
Comprendre l’autisme : entre idées reçues et réalités scientifiques
L’autisme, ou trouble du spectre autistique, intrigue, fascine, et parfois désoriente. Depuis les premiers travaux de Leo Kanner dans les années 1940, la science a progressé, mais les idées reçues persistent. En France, près de 1 % des enfants en sont concernés, mais derrière ce nombre se cache une diversité de situations souvent méconnue.
Contrairement à ce que l’on pourrait croire, beaucoup d’enfants autistes n’ont pas de déficience intellectuelle. Certains affichent même une intelligence dans la moyenne, voire au-dessus. Pourtant, dans les discussions sur la santé mentale, les adultes autistes restent largement invisibles. La multiplicité des profils rend le dépistage et l’accompagnement complexes, et laisse trop de personnes sur le bord du chemin.
Parler de « spectre », ce n’est pas un effet de style : les signes de l’autisme varient énormément d’un individu à l’autre. Difficultés de communication, interactions sociales inhabituelles, gestes répétitifs, hypersensibilité sensorielle : aucun parcours ne ressemble à un autre. Le diagnostic repose sur l’observation attentive d’un ensemble de manifestations, ce qui explique la variété des expériences et la difficulté d’accéder à un accompagnement adéquat.
La recherche se concentre de plus en plus sur les rouages biologiques de la condition. Les percées génétiques et les progrès en neurobiologie viennent bousculer les approches classiques. Ce qu’on découvre ? L’autisme ne se résume pas à un seul gène ou à une cause unique, mais relève d’un assemblage complexe de facteurs génétiques, de processus cellulaires et d’influences extérieures. Les équipes françaises, notamment à l’institut Pasteur, participent à cette dynamique : elles travaillent à des stratégies de dépistage plus précoces, plus personnalisées, pour mieux répondre aux besoins réels.
Quels rôles jouent la mère et le père dans la transmission de l’autisme ?
La génétique de l’autisme n’a rien d’un schéma simple. Ce que montrent les dernières études, c’est la complexité du patrimoine transmis par les parents, avec des rôles distincts pour la mère et le père. Les recherches menées par l’équipe de Thomas Bourgeron à l’institut Pasteur, entre autres, mettent en lumière cette asymétrie.
Chez les enfants autistes, on retrouve plus fréquemment des mutations « de novo », c’est-à-dire survenues pour la première fois chez l’enfant et absentes chez les parents, lorsque le père est plus âgé. L’âge paternel au moment de la conception favoriserait donc l’apparition de nouvelles mutations génétiques liées à l’autisme. Du côté maternel, on observe plutôt une transmission de certaines anomalies génétiques héritées que l’on peut parfois retrouver chez d’autres membres de la famille, même sans autisme diagnostiqué.
| Facteur parental | Mécanisme associé |
|---|---|
| Âge du père | Apparition de mutations de novo |
| Patrimoine maternel | Transmission de variantes génétiques familiales |
Les travaux de génétique sur l’autisme dessinent ainsi un équilibre fragile : le père, en vieillissant, augmente le risque de mutations inédites ; la mère transmet plus fréquemment des gènes à risque déjà présents dans la lignée familiale. Saisir cette différence, c’est mieux comprendre pourquoi le contexte familial, l’âge parental ou certains antécédents influencent le risque d’autisme chez les enfants.
Facteurs génétiques et environnementaux : démêler l’influence sur le risque d’autisme
L’autisme n’est pas le résultat d’un seul facteur. Les recherches récentes insistent sur la forte contribution de la génétique : selon certaines méta-analyses, elle expliquerait jusqu’à 80 % des cas. Mais la biologie ne dit pas tout. Les rôles du contexte de vie, de la grossesse, de l’environnement ne peuvent être laissés de côté.
Des syndromes rares comme le syndrome Phelan-McDermid illustrent la puissance d’une mutation précise. Mais la majorité des troubles du spectre autistique résultent d’une combinaison de multiples facteurs génétiques, parfois très subtils, et d’éléments extérieurs.
Voici les principaux éléments qui peuvent entrer en jeu :
- L’âge avancé des parents, surtout du père, qui augmente la fréquence des mutations de novo
- L’exposition à certaines substances toxiques pendant la grossesse, même si leur influence reste discutée
- La naissance prématurée ou des complications à la naissance, qui sont corrélées à un risque accru sans lien direct prouvé
Les chercheurs s’intéressent aussi à la différence de vulnérabilité entre filles et garçons. Les femmes autistes sont souvent moins détectées, mais il semblerait qu’il leur faille une « charge génétique » plus élevée pour manifester des symptômes équivalents à ceux des garçons.
Le dialogue entre génétique et environnement reste ouvert. Chaque histoire familiale, chaque parcours individuel, apporte des nuances. Rien n’est figé, rien n’est monocausal : c’est la multiplicité des influences qui façonne le risque d’autisme.
Facteur maternité, hérédité et acceptation : accompagner les familles face à l’autisme
Quand le diagnostic d’autisme tombe, la question de l’hérédité surgit avec force. Les parents cherchent à comprendre : « Pourquoi nous ? ». Les anciennes croyances, souvent culpabilisantes pour les mères, n’ont plus lieu d’être. Les avancées menées à l’institut Pasteur sous la houlette du professeur Thomas Bourgeron rappellent que les variantes génétiques impliquées ne suivent pas un schéma simple, ni du côté maternel, ni du côté paternel.
Des figures reconnues comme Simon Baron-Cohen à Cambridge, lui-même impliqué dans la recherche et concerné par l’autisme, soulignent la diversité des parcours familiaux. Pour environ 15 % des enfants autistes, une mutation responsable est clairement identifiée. Pour les autres, c’est un faisceau de facteurs qui s’accumule, parfois transmis par les parents, mais sans jamais se manifester chez eux. Il n’est pas rare que des parents soient porteurs de ces variantes sans n’avoir jamais été diagnostiqués, ni même présenter de symptômes.
Plusieurs leviers permettent aux familles de mieux avancer après un diagnostic :
- Un diagnostic précoce permet d’anticiper les besoins et d’organiser un accompagnement adapté pour l’enfant et ses proches.
- Une équipe pluridisciplinaire, généticiens, pédopsychiatres, psychologues, offre un suivi global et cohérent.
À Paris, à l’institut Pasteur, des consultations sur-mesure accueillent les familles, leur permettent de mettre des mots sur ce qu’elles vivent, et de trouver des ressources pour avancer. Accepter le trouble autistique, c’est changer de regard, réinventer le quotidien, et briser l’isolement. La science avance, l’écoute aussi. C’est ensemble, familles et professionnels, que de nouveaux horizons s’ouvrent.


