La fréquence des maladies transmises par les moustiques a doublé dans certaines régions du monde au cours des deux dernières décennies, selon l’Organisation mondiale de la santé. Une hausse inédite de la malnutrition infantile a été observée dans plusieurs pays d’Afrique subsaharienne ces cinq dernières années, alors même que les politiques d’aide alimentaire s’intensifient.
Des rapports récents soulignent une progression simultanée des troubles respiratoires et cardiaques dans les zones périurbaines exposées à des vagues de chaleur prolongées. Les systèmes de santé, déjà fragilisés, peinent à répondre à l’accumulation de ces nouvelles pressions sanitaires.
Comprendre le lien entre changement climatique et santé humaine
Le changement climatique s’immisce dans les rouages de la santé humaine et bouleverse des équilibres longtemps considérés comme acquis. Les scientifiques s’accordent sur une élévation de la température globale, qui rebat les cartes des phénomènes météorologiques extrêmes : canicules à répétition, crues inattendues, sécheresses qui s’éternisent. Ces événements frappent désormais tout le continent européen, la France comprise, sans distinction.
L’accumulation de canicules a coûté la vie à 2 000 personnes durant l’été 2022, rapportent les chiffres de Santé publique France. Ce chiffre n’est pas qu’un indicateur statistique : il pointe une vulnérabilité qui se creuse avec l’allongement de l’espérance de vie. Mais ce ne sont pas que les records de chaleur qui inquiètent. Les bouleversements du climat créent un terrain propice à la prolifération de nouveaux vecteurs infectieux. Les moustiques Aedes, par exemple, gagnent du terrain et emportent dans leur sillage des maladies comme la dengue ou le chikungunya, jadis inconnues sous nos latitudes.
Le réchauffement climatique agit en tandem avec la progression des gaz à effet de serre, qui contaminent l’atmosphère et enflamment le sujet de la pollution de l’air. Dans les villes, l’ozone troposphérique grimpe en flèche et accentue la fréquence des crises d’asthme, ou de maladies respiratoires au long cours. L’Organisation mondiale de la santé avance un chiffre glaçant : chaque année, 7 millions de décès prématurés à travers le monde sont attribués à cette exposition.
Voici les principaux mécanismes en jeu :
- Élévation de la température globale
- Accroissement des phénomènes météorologiques extrêmes
- Modification des écosystèmes propices aux maladies infectieuses
- Aggravation de la pollution atmosphérique
La santé humaine ne se limite plus à la confrontation classique entre agents pathogènes et individus. Elle s’inscrit désormais dans une matrice élargie, où les effets du changement climatique redéfinissent la nature même des risques sanitaires.
Quels sont les principaux risques sanitaires aggravés par le dérèglement climatique ?
Les risques sanitaires liés au dérèglement climatique ne se cantonnent plus aux infections hivernales ou aux épisodes ponctuels de grippe. La France, comme ses voisins européens, doit composer avec la montée en puissance de maladies infectieuses transmises par des moustiques désormais bien implantés. L’allongement des périodes chaudes et les bouleversements dans les précipitations offrent au moustique Aedes tout le loisir de s’installer. Résultat : la dengue, le chikungunya ou le virus Zika ne sont plus réservés aux tropiques. Ces virus passent aujourd’hui les frontières avec une facilité déconcertante.
Les vagues de chaleur deviennent un rendez-vous estival, dont le bilan ne cesse de s’alourdir. Les personnes âgées et celles atteintes de maladies chroniques en font les frais. La chaleur prolongée provoque déshydratation, défaillance rénale, troubles cardiovasculaires. La capacité du corps à réguler sa température s’effrite, un constat confirmé par les services de Santé publique France.
La pollution atmosphérique s’aggrave, sous la poussée des gaz à effet de serre. Ozone, particules fines, polluants en tout genre : la liste s’allonge et les impacts respiratoires aussi. Les asthmatiques, les enfants, les plus âgés font face à une recrudescence des crises et des hospitalisations.
Enfin, impossible d’ignorer les répercussions sur la santé mentale. L’éco-anxiété touche de plus en plus de personnes. L’exposition répétée à des catastrophes climatiques ou la crainte d’un avenir incertain alimentent le mal-être. Ce climat pesant franchit les portes des cabinets de psychologues, devenant un motif de consultation à part entière.
Populations vulnérables : qui sont les plus exposés et pourquoi ?
Les populations vulnérables paient le prix fort des effets du changement climatique sur la santé humaine. L’âge, l’état de santé, le niveau de vie ou la localisation géographique sont autant de curseurs qui font basculer le risque. Les personnes âgées sont particulièrement exposées : leur organisme peine à gérer les épisodes de fortes chaleurs et à se défendre contre la pollution de l’air.
Les enfants, en pleine croissance, voient leur immunité mise à rude épreuve. Leur système de défense, encore en construction, les rend plus vulnérables aux maladies infectieuses qui prospèrent avec le réchauffement. Pour les femmes enceintes, la menace est double : une exposition à la chaleur ou aux particules fines peut perturber le bon développement du bébé.
La précarité aggrave la situation. Ceux qui vivent isolés, qui n’ont ni logement adapté ni accès à un suivi médical, cumulent les difficultés. Les travailleurs en extérieur, du secteur du BTP à l’agriculture, subissent chaque été des conditions de travail à la limite du supportable : coups de chaud, troubles respiratoires, accidents auxquels ils sont de plus en plus confrontés.
La géographie fait le reste. En ville, les habitants pris au piège des îlots de chaleur endurent les pics de température. Ailleurs, dans des territoires ruraux parfois éloignés des centres de soins, la vulnérabilité grandit face aux phénomènes météorologiques extrêmes et à des ressources qui se raréfient.
Des solutions concrètes pour s’adapter et limiter les impacts sur la santé
Face aux effets du changement climatique sur la santé humaine, l’Organisation mondiale de la santé avance une stratégie double : adaptation et réduction des émissions de gaz à effet de serre. Les leviers d’action, validés par la recherche et déjà testés dans plusieurs régions françaises et européennes, montrent la voie.
Adapter les systèmes de santé
Plusieurs pistes concrètes s’imposent pour renforcer la résilience de l’organisation sanitaire :
- Mettre en place une surveillance épidémiologique renforcée des maladies émergentes, en particulier celles transmises par des vecteurs, afin de détecter rapidement les signaux faibles et d’anticiper les crises.
- Développer des protocoles de prise en charge spécifiques lors des vagues de chaleur ou des pics de pollution, pour mieux protéger les personnes à risque.
- Moderniser les infrastructures de santé : améliorer l’isolation des bâtiments, privilégier la ventilation naturelle, garantir l’accès à une eau potable de qualité.
Réduire les émissions et repenser l’urbanisme
Pour atténuer les impacts à plus long terme, il est nécessaire d’agir sur l’environnement urbain :
- Favoriser la mobilité douce et multiplier les espaces verts pour limiter les îlots de chaleur et purifier l’air ambiant.
- Investir dans l’efficacité énergétique des logements, qu’ils soient publics ou privés, pour limiter leur empreinte carbone et améliorer le confort des habitants.
La prévention occupe une place centrale. Former les soignants à la gestion des nouveaux risques liés au climat, sensibiliser les publics les plus fragiles, penser globalement l’articulation entre santé, environnement, urbanisme et politiques sociales : tout cela conditionne notre capacité à encaisser le choc climatique.
Les données issues de reviews systématiques confirment que les dispositifs d’action locale, impulsés par les collectivités, renforcent la résilience des territoires. La France et l’Europe disposent d’un socle législatif solide ; l’enjeu, aujourd’hui, est de passer à la vitesse supérieure, en mobilisant tous les acteurs concernés.
Face aux bouleversements climatiques, la santé humaine ne se joue plus seulement dans les cabinets médicaux. Elle s’invente aussi dans les choix de société, les politiques urbaines et l’engagement collectif. Notre capacité à faire front décidera du visage de la santé demain.